The Substance : le féminisme dans la peau

« Avez-vous déjà rêvé d’une meilleure version de vous-même ? Plus jeune. Plus Belle. Plus… Parfaite. » 

Lorsque l’on est une femme, impossible d’ignorer ce mirage sous-jacent. Des affiches publicitaires aux réseaux sociaux, tout pousse à s’accrocher au dogme anti-âge.

La protagoniste de The Substance n’échappe pas à ces pressions. Elizabeth Sparkle (Demi Moore), ancienne actrice célèbre, est licenciée de son émission d’aérobic le jour de ses 50 ans. Désespérée par ce dernier clou dans le cercueil de sa carrière, elle s’injecte une obscure matière censée créer un double d’elle-même rajeuni.

Une critique du culte de la beauté 

Reprenant l’idée de son court-métrage Reality+ (2014), la cinéaste Coralie Fargeat dénonce l’absurde culte de la beauté sous l’angle du body-horror*. Par l’omniprésence de plans graphiques et un travail du son immersif, le public est poussé dans ses moindres retranchements, sans cesse balancé entre fascination et dégoût. Outre cette maîtrise technique, la vision féministe de la réalisatrice apporte une perspective innovante en interrogant la manière dont le corps féminin peut passer d’un objet de désir à une cible de répulsion, voire d’agression

Un choix de casting qui fait sens

Les choix de casting font résonner avec pertinence fiction et réalité. Demi Moore a suivi la même trajectoire que son personnage : actrice phare des années 1990, elle a été repoussée hors-champ par Hollywood, puis critiquée par la presse pour ses opérations de chirurgie esthétique. Le double d’Elizabeth, Sue, est incarné par Margaret Qualley. L’actrice et mannequin d’à peine 30 ans représente la nouveauté réclamée par l’industrie audiovisuelle : une femme plus jeune, dans les standards de beauté, constamment érotisée. 

Jusqu’au dernier acte, la mise en scène souligne sans ambiguïté l’obsession pour la jouvence et en dévoile les conséquences auto-destructrices sur les femmes. Or, le film s’achève par une mise en ridicule de sa protagoniste, faisant perdre du même coup toute compassion pour elle. Les moqueries spectatorielles se rapprochent de celles que subissent les Elizabeth de notre réalité. Après un équilibre réussi entre empathie et critique acerbe, cette distance conclut The Substance avec un arrière-goût amer.

Lilou RICHARD.

The Substance de Coralie Fargeat, en salles le 6 novembre 2024. Durée : 2h20. Au Mans, le film est projeté aux cinéma Les Cinéastes.

*sous-genre de l’horreur spécialisé dans la dégénération et/ou la destruction du corps humain.

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