Publié pour la première fois en 1928, cet opéra écrit par le dramaturge allemand Bertolt Brecht présente une réflexion fascinante sur la condition humaine. Brecht dépeint le destin tragique du « rebut de l’humanité ».
Cette pièce écrite par Brecht en collaboration avec Elisabeth Hauptmann et Kurt Weill pour la composition orchestrale, donne à voir la destinée de Macheath, voleur, assassin, escroc et proxénète aux multiples conquêtes amoureuses. L’intrigue se déroule à Londres, dans les quartiers les plus pauvres de la ville alors que la nouvelle Reine d’Angleterre s’apprête à être couronnée. Le théâtre politique de Brecht s’appuie ici sur le discours des marginaux : L’escroc Macheath et ses hommes de main, les prostituées, les mendiants dirigés par Peachum et les policiers corrompus. Macheath prend pour épouse Polly, fille de Peachum, le chef avare des mendiants qui capitalise sur la pitié.
« Messieurs, Mesdames, assez de baratin
Ce n’est que de ses crimes que vit l’humain ! »
La seule éthique ici est celle de la survie par le gain économique, contre toute morale proférée par la religion et l’ordre bourgeois dont la Loi est une violence institutionnalisée.
« Pour vous montrer qu’à l’opéra
Au moins cette fois, la grâce l’emporte sur le droit. »
L’opéra de quat’sous… Vous avez dit « opéra » ?
Le théâtre politique de Brecht reprend ici des procédés associés à des genres littéraires bien différents. Le ton pathétique chante la misère humaine et s’associe aux chansons grivoises qui donnent à l’œuvre une tonalité comique. Le tout forme une symphonie étrange et discordante. La pièce de Brecht est une tragédie où les vices de Macheath le rattrapent pour le conduire à une fin funeste, avant un deus ex machina qui propose un autre dénouement. L’artifice théâtral confère une valeur plus esthétique que morale à la pièce :
Texte et photo : Constance JOSSE.
« L’opéra de quat’sous », Bertolt Brecht, Edition « L’Arche », 1928, 118 pages.