Le Rapport de Brodeck, un conte sur la folie humaine

D’abord un roman de Philippe Claudel (2007), Le Rapport de Brodeck a été adapté en BD en deux tomes par l’immense Manu Larcenet en 2016. Peinture sombre de l’homme et mémoires de la haine, il s’agit d’un récit troublant et d’une beauté triste.

Le rapport à l’Autre remis en question

Brodeck est un villageois qui vit à la lisière de la forêt, loin du bourg, peu enclin à la compagnie des hommes. Un jour qu’il se rend en ville pour des commissions, il découvre que tous les habitants se sont réunis dans un but inconnu. Si Brodeck sait ce qu’il s’est passé, le lecteur n’en a qu’une intuition… Les habitants confient alors à Brodeck la charge d’écrire un rapport pour expliquer les événements depuis l’arrivée de l’Anderer (l’étranger), et tenter de justifier leur acte.

Un récit entre fable et Histoire

La narration s’enclenche alors, par bribes, sans suivre un fil chronologique, et l’on ne découvre les ressorts de l’histoire qu’au fur et à mesure des méditations réminiscentes de Brodeck. On apprend qu’il a été déporté pendant la guerre et a subi les camps, et qu’il n’est revenu que depuis peu. L’air est encore lourd de l’occupation, de la peur, et de la haine de l’autre. D’ailleurs, Brodeck n’étant pas originaire du village, sa déportation et son retour n’ont fait qu’accentuer la méfiance qu’ont les villageois envers lui. Comme pris au piège, Brodeck se rend compte que le village tout entier est un monstre qui le guette, prêt à l’engloutir.

L’encrage parfait, mélancolique et effrayant de Manu Larcenet appuie ce récit entre fable et Histoire sur le monstre qui vit en l’homme, sur le pouvoir de la narration et sur la figure mystique, fascinante et crainte, de l’Autre.

Texte et illustration : Charlie Plès.

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