L’Adversaire, la traque de l’homme dans la bête

Publié en 2000, L’Adversaire d’Emmanuel Carrère n’est pas un roman et c’est en cela qu’il est effrayant. Il y raconte l’histoire, en essayant de la comprendre, de Jean-Claude Romand, qui, après une vie entière de mensonges, massacre sa famille avant de tenter de mettre fin à ses jours. Une tentative de retrouver l’homme dans la bête.

On remarque immédiatement la consonance biblique du titre ; L’Adversaire est en effet l’un des noms du diable. Faut-il alors parler de possession démoniaque dans le cas de Jean-Claude Romand ?

Romand, nom ironique quand on sait que l’homme a passé son existence à s’inventer un double fictif ; connu comme médecin émérite, il ne s’était en fait jamais présenté à ses examens de médecine. Sa fortune était constituée d’emprunts à sa famille et d’argent détourné à ses proches qui le lui confiaient pour le placer. L’étau du mensonge, inévitablement, se resserre sur Romand qui voit la vérité arriver à grands pas ; plutôt que d’affronter le regard des autres, il décide de tuer sa femme, ses enfants et ses parents, et d’incendier sa maison. Un réflexe de survie le sauvera de sa tentative de suicide.

Comme à son habitude, Carrère mène son récit avec brio

Carrère est fasciné par son histoire et s’en ressent d’ailleurs coupable. Il entre dans une relation ambiguë avec le détenu, entre amitié et répulsion. Ce livre est une tentative de comprendre ce qui a pu motiver un homme à s’engranger lui-même dans une telle machine infernale jusqu’à aboutir à la plus abominable des tragédies. Comme à son habitude, Carrère mène son récit avec brio en adoptant une position toujours juste, entre la conscience du monstre et la volonté de découvrir et connaître le véritable Adversaire, pour peut-être ainsi l’éradiquer ; l’inconnu.

Texte et illustration : Charlie PLÈS.

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