La trilogie de Beckett (2) : Malone meurt

Ce deuxième épisode de la « trilogie romanesque de Beckett » s’intéresse au roman Malone meurt, qui est peut-être le moins connu des trois, mais qui a toute sa place dans la dialectique qu’installe la trilogie. Après l’homme boiteux puis rampant, vient l’homme immobilisé.

Malone est reclus dans une chambre, incapable de se lever du lit dans lequel on le maintient en convalescence. Qui « on » ? Cette même instance mystérieuse pour laquelle Molloy et Moran rédigeaient leurs histoires. Ici, même si Malone croit écrire pour lui et garde secret son récit, on ne peut que constater que c’est pourtant bien « eux » qui lui ont laissé dans sa chambre un carnet et un crayon.

Dans son agonie où il se complaît, Malone raconte à la fois sa non-vie dans la chambre, et une histoire qu’il invente sur un certain Saposcat qui devient bien vite Macmann. Si les deux récits évoluent d’abord en parallèle, la fiction de Macmann et la réalité de Malone tendent peu à peu à se confondre, si bien que le narrateur, censé être Malone, se désigne parfois sous le nom de son personnage, voire perd complètement son nom. Cette confusion est particulièrement distincte lorsque Macmann se réveille dans une sorte d’asile psychiatrique, où il est, lui aussi, immobilisé dans une chambre.

La fiction envahit tout à mesure que Malone meurt, qu’il meurt et n’en finit pas de mourir, qu’il attend qu’enfin il n’y ait « plus rien », pour citer les ultimes mots du livre.

On remarque une certaine prégnance chez Beckett des noms de personnages en M : Molloy, Moran, Malone, Macmann… Des noms qui commencent comme un gémissement qui tente de dire quelque chose, ou plutôt qui ne parvient pas à se taire ; le « M », le « Mo », c’est la « Mort » inachevée qui mène à L’Innommable…

Texte et illustration : Charlie PLES.

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