Jean-Baptiste Rivoire : « Nous devons réinventer la presse »

Lors des Carrefours de la Pensée (18/19 mars 2022), au Palais des Congrès du Mans, Jean-Baptiste Rivoire s’est confié à Vitav. Le journaliste d’investigation s’est exprimé sur les grands enjeux autour des médias, les menaces, ainsi que les perspectives qui gravitent autour…

« Il va vraiment falloir entrer en résistance »

Vous avez pu témoigner de votre expérience chez Canal + et de l’ascension de Vincent Bolloré dans la ligne éditoriale. Redoutez-vous la fin de la liberté de la presse ?
Oui, je suis un peu inquiet. Le niveau de contrôle de la presse privée est très important et notre Président de la République actuel est en train de faire péter un énorme verrou : en supprimant la redevance à l’audiovisuel public, il va supprimer des contrepouvoirs, des médias qui interrogeaient les réalités économiques. Je trouve cette situation assez effrayante. C’est une co-production de l’étouffement de l’info par des milliardaires et un Président.

La seule bonne nouvelle, c’est que des médias indépendants trouvent beaucoup de succès auprès des citoyens qui les financent et qui s’enthousiasment. Nous allons arriver à inverser la tendance, mais il va vraiment falloir entrer en résistance.

 

 

Vous avez appelé les citoyens à se révolter contre la montée des puissants dans les médias. Pensez-vous qu’il faille plus de sensibilisation et d’éducation sur les médias ?
Oui. Cependant, la presse n’est pas vraiment bienvenue à l’école, sauf une semaine par an. Je pense que lorsqu’on fait des cours de Français, il faut lire et écrire en lisant des journaux. Il faudrait une éducation à l’info. A chaque fois que je peux, je suis prêt à intervenir dans des débats. Nous avons entendu quelques confrères raconter les coulisses, je pense que c’est assez éclairant sur ce métier. Nous devons réinventer la presse.

« Un peuple qui n’est pas informé c’est un peuple qui est esclave »

Que représente pour vous le métier de journaliste d’investigation et quel rôle doit-il avoir dans notre société ?
C’est celui qui enquête pour découvrir où sont les vérités dans un océan de propagande. Nous sommes cernés par cette propagande, des entreprises, des gouvernements, des pouvoirs. Notre boulot consiste à déconstruire ces propagandes, à les dissiper, à les exposer au grand jour pour relater la vérité. Nous sommes forcément dérangeants, des résistants, mais c’est un beau métier.

« Il faut inventer le monde de demain »

Quels conseils donneriez-vous à des jeunes voulant devenir journalistes ?
Si j’ai un conseil à leur donner, c’est de parler à leur génération. Ils doivent créer de nouveaux médias, de nouvelles règles du jeu. Il existe plusieurs moyens pour que les citoyens puissent donner de l’argent pour soutenir ce qu’ils aiment. J’ai 8 documentaires sur visibles sur Youtube. Toutes ces nouvelles applis vont, à mon avis, rapprocher les citoyens des journalistes.
Il faut laisser mourir les grandes marques d’information qui ont été instrumentalisées, contrôlées par des gens qui veulent surtout étouffer l’information. Les grands médias restent intéressants dans le cadre de stages ou autres pour apprendre, mais après il faut inventer le monde de demain.

Propos recueillis par Andrès GODEFROY.

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