« J’ai perdu le goût des études »

« Depuis le début du deuxième semestre, je fonds en larmes chaque jour »

Quelques minutes avant l’un de mes rares cours en présentiel, je discute avec des camarades et des amis dans le hall de Sciences Po. Des appariteurs viennent nous disperser en nous disant qu’on ne peut pas rester à plusieurs pour « des questions sanitaires ». En rentrant dans mon appartement parisien, je fonds en larmes comme chaque jour depuis le début du deuxième semestre. J’ai conscience d’être ultra privilégié. Je ne vis pas dans 9m2 et les bourses m’aident beaucoup. Mais je n’arrive plus à tenir avec les cours à distance. Ma motivation s’érode peu à peu.

«  Je ne m’embête plus à allumer mon ordinateur »

J’enchaîne les heures de « zoom », je me noie dans l’écran de mon ordinateur. Je ne prends plus de notes, je ne participe pas. Au début, je faisais acte de présence et maintenant, je ne m’embête plus à ouvrir mon ordinateur. Alors bien sûr, on essaye de suivre les cours à plusieurs, chez les uns et les autres. Mais rien ne peut remplacer une séance en présentiel.

« Nous sommes prisonniers de cours en distanciel, sans aucune perspective »

Les étudiants morflent, décrochent. Ils sont déconsidérés, infantilisés. L’absurdité de la situation me rend malade. On peut aller faire nos courses dans un «Lidl» bondé, mais impossible de suivre un cours dans lequel nous sommes 20 ? Les cours à l’université ne se résument pas à des amphis plein à craquer. En TD (Travaux dirigés), nous sommes moins qu’une classe de lycée, mais tout le monde s’en fiche. Nous sommes prisonniers de cours en distanciel sans aucune perspective. Non, il n’y a pas 40 % des étudiants qui souhaitent rester en distanciel. Dire le contraire témoigne bien d’une absence de considération et de compréhension pour des étudiants qui préfèrent rentrer chez leurs parents pour ne pas payer un loyer pour deux heures de présentiel !

« Continuer le reste du semestre sur cette voie serait un désastre »

Je suis en train de perdre le goût des études. Continuer le reste du semestre sur cette voie serait un désastre. Si on peut saluer les mesures prises par le gouvernement comme les repas à 1 €, seule la reprise en présentiel pourrait améliorer le moral des étudiants. Nous ne demandons pas la réouverture des boîtes de nuit, mais simplement des conditions d’études dignes.

Ismaël EL BOU – COTTEREAU, étudiant en double diplôme sciences sociales et lettres modernes à Sciences Po Paris et Sorbonne IV.

Crédit photo : Isabelle Eshraghi.

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