« First Cow » : et pour quelques beignets de plus…

Après Certaines Femmes (2017) salué par la critique, la cinéaste américaine Kelly Reichardt est de retour derrière la caméra avec First Cow, un western moderne, humaniste empli de mystères et…de beignets !

Au début du XIXe siècle, sur les terres encore sauvages de l’Oregon, Cookie Figowitz, un humble cuisinier, se lie d’amitié avec King-Lu, un immigrant d’origine chinoise. Rêvant tous deux d’une vie meilleure, ils montent un modeste commerce de beignets qui ne tarde pas à faire fureur auprès des pionniers de l’Ouest, en proie au mal du pays. Le succès de leur recette tient à un ingrédient secret : le lait qu’ils tirent clandestinement chaque nuit de la première vache introduite en Amérique, propriété exclusive d’un notable des environs.

« The bird a nest, the spider a web, man friendship » (à l’oiseau le nid, à l’araignée la toile et à l’homme l’amitié). Ainsi s’ouvre la mystérieuse fable que Kelly Reichardt s’apprête à nous raconter. Cette citation attribuée au poète William Blake et mise en avant dans Half-Life de Jon Raymond (roman dont le film est adapté) suggère la caractéristique naturelle et innée de l’amitié chez l’homme.

Cette amitié, c’est celle de King-Lu et Cookie (interprétés avec brio par Orion Lee et John Magaro). À première vue simple et naïve, elle rend tout au long du film les mots de William Blake plus vrais que jamais. Elle devient au fil de leurs (més)aventures un espace de vie, où ils se sentent chez eux dans une société en construction : celle des colons de l’Oregon dans les années 1820.

La réalisatrice porte un regard amusé et critique sur la société d’aujourd’hui

Au delà de cette histoire atypique, la cinéaste, en représentant les balbutiements de la société américaine d’hier, porte un regard amusé et critique sur la société d’aujourd’hui : les exemple dans le film sont nombreux, mais le plus explicite reste le regard porté sur l’offre et la demande, et par extension, sur le capitalisme à travers le commerce de beignets des deux protagonistes principaux.

First Cow rend à l’amitié sa définition authentique : celle d’un espace de vie où les humains se sentent chez eux

La photographie de Christopher Blauvelt y est particulièrement réussie et sublime la nature qui semble être, par endroits, préservée de la main de l’homme. La caméra toujours proche du sol et le format 4/3 permettent au spectateur d’être absorbé dans cet univers contemplatif. Kelly Reichardt signe avec First Cow une véritable ode à l’amitié et à la nature, dont la simplicité peut-être trompeuse.

Sacha FESTY.

First Cow de Kelly Reichardt, en salles depuis le 20 octobre 2021. Durée : 2h02.

Parallèlement à la sortie du film, le cinéma « Les Cinéastes », au Mans, propose en une rétrospective consacrée aux 7 long-métrages de la réalisatrice jusqu’au 23 novembre 2021.

 

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