2 romans puissants sur le parcours des transfuges de classe

Nesrine Slaoui et Maryam Madjidi racontent dans leurs récits respectifs l’histoire d’une ascension sociale qui nécessite de nombreux sacrifices. 

« Aucun diplôme, aucune récompense, aucune grande école ne gomme vraiment nos origines »

Illégitimes de Nesrine Slaoui

Nesrine Slaoui a toujours cru que ses bonnes notes à l’école lui ouvriraient les portes de la réussite.  Elle quitte Apt (Vaucluse) pour poursuivre des études de journalisme à Sciences Po Paris. Tiraillée entre ses origines sociales modestes et sa volonté d’intégrer l’élite, Nesrine va nourrir un profond sentiment d’illégitimité.
A l’instar du personnage Martin Eden de Jack London, la jeune femme rattrape son retard, lit et travaille comme une acharnée. Elle comprend la part d’artifice et de vacuité de la bourgeoisie.
La découverte de la sociologie bourdieusienne lui permet de déconstruire le mythe de la méritocratie républicaine. Elle subit également le racisme, sans cesse ramenée au statut de « beurette ».

Illégitimes pose un regard à la fois amer et vibrant contre les multiples assignations identitaires : « On m’a menti, on nous a menti; il n’y a rien qui puisse effacer ce que nous sommes. On ne se réinvente pas. Aucun diplôme, aucune récompense, aucune grande école ne gomme vraiment nos origines ». 

 

Pour que je m’aime encore de Maryam Madjidi

« Ce livre est une oeuvre de fiction. Par conséquent, toute ressemblance avec des situations réelles ou des personnes existantes ou ayant existé n’est ni fortuite ni involontaire ». L’avertissement de Maryam Madjidi place son ouvrage sous le sceau du récit personnel. Dans Pour que je m’aime encore, l’autrice raconte avec beaucoup d’humour et de justesse son enfance passée à Drancy dans une famille d’origine iranienne.

La dernière partie du livre est consacrée au véritable choc social qu’elle ressent lorsque qu’elle est admise à Fénelon en hypokhâgne. Face à la charge de travail et le poids écrasant de la « culture légitime », le Français devient pour elle « une langue étrangère ». Elle comprend qu’on a voulu d’elle dans cette classe préparatoire prestigieuse pour remplir les quotas « diversité » et « élèves boursiers ».
Cette plongée dans le temple de l’élitisme parisien va la détruire à petit feu. L’écriture va être son moyen d’être en paix avec elle-même et de ne plus avoir honte de ses origines sociales.

Texte et photos : Ismaël EL BOU – COTTEREAU.

Image mise en avant extraite du téléfilm « Les héritières » de Nolwenn Lemesle (2021).

Illégitimes de Nesrine Slaoui (janvier 2021/Editions Fayard). 198 pages

Pour que je m’aime encore de Maryam Madjidi, (août 2021/Nouvelle Attila). 206 pages.

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