TENET : le film événement de Nolan ne tient pas ses promesses

Après de longs mois d’incertitude, le nouveau long-métrage de Christopher Nolan arrive enfin sur nos écrans le mercredi 26 août, marquant le retour des productions hollywoodiennes dans les salles obscures. L’importance industrielle de l’événement, conduit par la figure iconique de Nolan (seul véritable auteur de blockbuster dans le paysage contemporain) a cristallisé une anticipation hors du commun : mais que vaut vraiment Tenet ?

« N’essaie pas de comprendre. Ressens »

Film de science-fiction à concept – l’inversion temporelle – sous fond de thriller d’espionnage, c’est à cela que l’on peut résumer Tenet sans en dévoiler l’intrigue. Celle-ci est, bien entendu, particulièrement complexe, comme à l’habitude du réalisateur qui, une fois encore, s’amuse à remodeler le temps filmique.

Prononcés par un personnage nolanien (Clémence Poésy dans les premières minutes de Tenet), ces mots ont de quoi étonner. S’illustrant par son réalisme scientifique, sa filmographie s’ancre d’ailleurs dans une tendance à la surexplication du fonctionnement de ses diégèses*. L’expérience sensorielle et quasi-muette que proposait Dunkerque constituait d’ailleurs une rupture de facto avec les obsessions du metteur en scène.

De nouveau, c’est dans la mise en scène de l’action que Tenet s’impose, notamment dans l’utilisation de son concept qui offre plusieurs séquences visuellement grisantes, soutenues par la BO efficace de Ludwig Goränsson.

Personnages-fonction creux, montage scandaleux

Cette promesse d’abstraction n’est pourtant pas tenue et l’impénétrabilité de l’intrigue se révèle servir de malhonnête cache-misère à la paresse de l’écriture. Tenet s’embourbe en arcs narratifs prétextuels (les fameux MacGuffins) et sur des personnages-fonction terriblement creux ; tout travail d’ambiance est annihilé par un montage scandaleux, rendu irrespirable pour exécuter l’intrigue le plus rapidement possible. Nolan ne choisit pas quelle démarche adopter et hésite continuellement entre le divertissement cinétique immersif et un sous-James Bond boursouflé à l’épate conceptuelle. Alors que la mise en scène elle même abandonne tout effort, hormis quelques saillies d’action, il devient pour ainsi dire impossible au spectateur de ressentir quoi que ce soit ; peut-être les plus courageux essaieront-ils de comprendre pour combler l’ennui ?

En plus d’accentuer ses défauts habituels, Nolan livre ici un film profondément inabouti et in fine assez malhonnête, loin de la grande oeuvre attendue pour relancer l’économie du cinéma.

Note : 3/10

Victor L.

En salles le 26 août 2020. Durée : 2h31. Tout public.

*Diégèse : Espace-temps dans lequel se déroule l’histoire proposée par la fiction d’un récit, d’un film.

 

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