Soleil amer : une fresque familiale poétique et ambitieuse

Journaliste pour l’émission « Quotidien », Lilia Hassaine publie son deuxième roman, « Soleil amer ».  Elle confirme son talent d’autrice avec cette chronique familiale sur fond d’immigration algérienne qui laisse toutefois un goût d’inachevé. 

« Certains lieux parlent la langue des souvenirs. Vous n’y êtes jamais allé, et pourtant vous reconnaissez tout »

Le lieu qui innerve Soleil amer et qui permet l’émergence d’une mémoire littéraire est la commune de Djemila en Algérie. Ce lieu existe dans le souvenir des personnages qui le rendent présent grâce au récit. Lilia Hassaine brosse une fresque familiale sur trois décennies, incarnée par une myriade de personnages. Au début du roman, Naja, véritable « mère courage », élève seule ses enfants en Algérie. Son mari, Saïd, travaille alors en France à la fin des années 50. Naja va ensuite le rejoindre et la famille, enfin unie, va s’entasser dans un HLM. Le couple a alors un nouvel enfant qu’ils ne peuvent pas élever à cause de leur situation de précarité sociale.

Exil, racisme, années SIDA, banlieues ravagées par l’héroïne

De cette histoire de gémellité, de drames et de secrets familiaux, on n’en dira pas plus. Soleil amer est un effet un roman très court qui brasse pourtant de nombreuses thématiques : l’exil, le racisme, les années Sida et les banlieues ravagées par l’héroïne… Le titre oxymorique, emprunté à un vers de Rimbaud, souligne les diverses trajectoires des personnages. Certains vont réussir et d’autres vont sombrer. Certaines vont être rattrapées par le conservatisme religieux en plein mai 68 et d’autres vont parvenir à se libérer au prix de lourds sacrifices.

La plume fluide et naturaliste de Lilia Hassaine

Lilia Hassaine maîtrise l’art de la concision. Sa plume est à la fois fluide, naturaliste dans la description des personnages. Certains passages sont même plus poétiques et rappellent les descriptions sensuelles de Tipasa d’Albert Camus dans Noces. 

Une autrice talentueuse et sensible

Cette concentration de la narration en une centaine de pages peut laisser une impression d’inachevé et d’analyses survolées. Peut-être qu’un roman plus ample aurait permis plus de justesse. On sent que Lilia Hassaine écrit sur la pointe des pieds et qu’elle ne déploie pas l’ensemble de son potentiel. Moins singulier que son premier ouvrage, L’œil du paonSoleil amer ancre toutefois l’éclosion d’une autrice talentueuse et sensible.

Ismaël EL BOU – COTTEREAU (texte et photo)

Soleil amer de Lilia Hassaine, Gallimard, 160 pages.

 

 

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