« Medusa » : une épopée visuelle politique et pétrifiante

Présenté à la Quinzaine des Réalisateurs à Cannes en 2021, le dernier film de la réalisatrice brésilienne Anita Rocha Da Silveira est sorti le mercredi 16 mars 2022 dans les salles obscures. L’occasion pour le spectateur de plonger dans un univers surréaliste et grinçant d’engagement politique.

Medusa prend place dans un Brésil dystopique où l’évangélisme et le retour des règles religieuses ont été poussés à leur paroxysme : le fanatisme a gagné le cœur des fidèles et y compris des femmes, aveuglées tant elle sont dévouées à leur Dieu. Mariana (superbement interprété par Mari Oliveira) fait partie d’un groupe de femmes qui cherchent à faire appliquer leur justice. Le jour, elles veillent à garder une apparence décente, à être pure et à faire honneur à leur mari. La nuit, elles dissimulent sous un masque leurs visages pour lyncher des « femmes pécheresses », sorties du « droit chemin » pour qu’elles avouent leur « crimes » et soumettent leur volonté à Dieu.

Medusa est une référence évidente au mythe de Méduse, qui transforme quiconque croise son regard en statue de pierre. Cette malédiction a été attribuée à Méduse, « punie pour sa sexualité », pour ne pas avoir été « pure », écho évident aux femmes visées par le groupe fanatique de Mariana.

Un long-métrage aux allures de film expérimental

Bien que le film soit fictionnel, il est véritablement ancré dans la réalité politique brésilienne contemporaine, inspiré du retour d’une idéologie machiste, sexiste, qui fait une place de plus en plus conséquente à l’évangélisme dans les institutions.

Le spectateur est d’emblée intégré dans une relation regardant-regardé omniprésente et médusante.

Dans ce long métrage aux allures de film expérimental, la caméra de João Atala (directeur de la photographie) magnifie les corps, exalte les visages avec des gros plans, crée des images avec une forte plasticité dès la première séquence du film; sublimation hypnotisante d’un corps dansant sur un fond noir divisé par deux lumières différentes.

Ce travail sur les couleurs (l’omniprésence de teintes rouges et vertes notamment) et sur la lumière s’étend sur tout le film, laissant place à une ambiance proche de l’abstrait et pétrifiante à l’image du regard de Méduse du mythe, et de celle qui sommeille en chacune de ces femmes oppressées qui n’attendent qu’à être réveillée !

Sacha FESTY.

« Medusa » d’Anita Rocha Da Silveira est en salle depuis le 16 mars 2022. Durée : 2h07.

 

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