Récit à la fois étonnant, angoissant et posant de nombreuses problématiques sociales actuelles, Truismes de Marie Darrieussecq (1996, Galllimard) nous offre un court roman délirant et effrayant sur la toile d’un féminisme singulier.
Dénonciation de la pensée machiste qui rampe, invisible, dans notre éducation
L’intrigue de Truismes est simple : une femme engagée comme masseuse « spécialisée » dans une parfumerie se transforme peu à peu en truie, et le monde qui l’entoure l’abandonne peu à peu, se changeant monstrueusement lui aussi. La narration à la première personne présente le récit comme une sorte de journal écrit d’une traite, et l’un des aspects les plus angoissants du livre repose sur la naïveté et l’incompréhension du personnage face à ce qu’elle vit.
En effet, le monde dans lequel évolue cette anonyme transpire la sexualité malsaine, dans laquelle elle est plongée dès les premières pages : cette femme est utilisée comme un objet dans son ménage, dans son travail, dans la société en générale, mais cette utilisation de son corps par les autres lui apparaît tout à fait naturelle. Elle adhère profondément à cette représentation de la femme objet sans penser un instant à la remettre en question, et on voit à travers cette acceptation résignée et béate la dénonciation de la pensée machiste qui rampe, invisible, dans notre éducation.
Ainsi, la femme devient-elle, comme l’insulte le voudrait, une « cochonne », qui continue de plaire aux hommes, jusqu’à un certain stade où, de plain-pied dans sa nouvelle nature dans laquelle elle trouve un certain plaisir, une liberté découverte, elle est alors brusquement rejetée par une société de plus en plus autocratique et sadique, la caricature d’un monde où le plaisir masculin, devenu consommation littérale de chair, est la seule règle, dissimulée derrière la devise d’un « monde plus sain ».
Texte et illustration : Charlie PLÈS.