Victime d’inceste, A, une adolescente mancelle de 16 ans, n’a jamais réussi à parler de son histoire. Cet entretien est un moyen d’expression lui permettant de se libérer.
Quel lien aviez-vous avec X, votre bourreau ? Quel était son âge ?
Il avait 45 ans, il était le compagnon de ma mère. Ils n’étaient pas mariés. Mon papa s’est suicidé lorsque j’avais 9 ans et ma maman a rencontré x quelques mois plus tard.
Quels termes employez-vous pour définir les actes d’X ?
C’est difficile. Je dis souvent qu’il a fait ce qu’on n’a pas le droit de faire, surtout sur une enfant. Son acte est incompréhensible, inhumain. Cela ne devrait jamais arriver.
Vous avez conscience qu’il s’agissait d’attouchements sexuels ?
Oui, mais ces mots sont trop durs, j’ai du mal à les employer. Pour moi, employer ces termes, c’est comme si nous étions ranger dans des cases.
De qui parlez vous en évoquant « nous » ?
« Nous » représente toutes les personnes dont d’autres croient pouvoir profiter comme si elles leur appartenaient, brisant ainsi leur confiance dans la nature humaine et la vie en général. Je ne sais pas si cela accroît ma souffrance, car je n’arrive pas à la définir, mais je suis révolté. Il est anormal de mettre des mots sur de tels actes. Encore moins de les regrouper dans un terme général.
Vous pouvez préciser ?
Les paroles qu’X chuchotaient à mon oreille, les moments où il hurlait comme si j’étais son chien, les gestes sur mon corps, l’expression de son visage, la tenue qu’il portait… C’est bien plus que des attouchements sexuels. Et chaque histoire étant différente, personne ne peut revivre le film d’horreur des événements passés. Je suis encore aujourd’hui incapable de mettre des mots pour définir ce que j’ai vécu.
Propos recueillis par Camille GENTILHOMME.
Crédit photo : Camille Gentilhomme.
Illustration : Charlie Plès.