Chez Cendrars, le langage est monde et le monde est langage

Blaise Cendrars n’a pas une tête de poète ; pourtant, sa plume légère et vive a couché sur le papier de magnifiques textes sur le voyage, le monde urbain, le quotidien et l’envie d’évasion.

Du monde entier au cœur du monde, voilà le titre du recueil qui rassemble les poèmes de Cendrars, un titre qui exprime parfaitement ce mouvement de va-et-vient d’un extrême à l’autre qui revient toujours au même point central ; l’écriture de Cendrars est une pulsation, un battement de cœur.

Dans un style bien à lui, où « rien ne dissemble plus de lui que lui-même » (Diderot, Le Neveu de Rameau), toujours reconnaissable et toujours redécouvert, Cendrars raconte ses voyages, ses amours, ses pensées sur l’écriture, qui s’agite en lui « nerveusement » comme le dirait Michaux à propos des artistes, dans une prose versifiée qui l’inscrit dans le courant surréaliste tout en l’en démarquant.

Cendrars n’a pas peur d’utiliser les mots les plus communs et les plus matériels pour faire s’envoler le langage ; si le romantique a osé écrire « cochon », Blaise Cendrars a osé écrire « radiateur », « tape-cul » ou encore « les W-C de la gare ».

Chez Cendrars, le langage est monde et le monde est langage : la plus grande preuve en est le triptyque des « Sonnets dénaturés », trois poèmes qui jouent avec les mots, la typographie, la dimension visuelle du texte.

La vie et l’art sont les deux rouages d’une même dynamique qui est peut-être nommée dans ces vers qui reviennent à deux reprises dans le recueil : « La guillotine est le chef-d’œuvre de l’art plastique/Son déclic/Crée le mouvement perpétuel. » La musique, le mouvement et la lame coupante de la réalité, voilà toute la poésie de Cendrars.

Texte et illustration : Charlie PLÈS.

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