Le peintre et sculpteur dévoile une centaine de créations flamboyantes à la Collégiale Saint-Pierre-la-Cour dans une série baptisée « Humanité ». L’artiste de 33 ans se confie à Vitav sur sa fuite du Congo en 2017, ses inspirations et sa démarche artistique.
Comment se décline votre exposition ?
Elle se compose de 80 toiles et une douzaine de sculptures. Mes peintures retracent trois périodes marquantes de ma vie : celle où je vivais au Congo et que j’avais pu sauver quelques-unes de mes œuvres avant de fuir mon pays, celle où je suis arrivé en France, lorsque je cherchais comment rétablir mon style. Enfin, la période 2022-2023 où j’ai réaffirmé mon identité artistique avec la volonté de l’approfondir à l’image de la toile baptisée « L’extra-terrestre » sur les nouvelles technologies.
« J’ai été envoyé en prison au Congo car je défendais la cause des femmes et des enfants du pays »
En 2017, vous avez dû fuir votre pays, la République Démocratique du Congo. Qu’est-ce qui vous a poussé à l’exil ?
Nous étions en période électorale. Avec un collectif d’artistes de Kinshasa, nous voulions défendre la cause des femmes et des enfants. Notre démarche n’a pas plus au régime du président Joseph Kabila, un dictateur. J’ai été mis en prison avec un ami. J’ai réussi à m’évader et à quitter le pays grâce à l’aide d’une personne. La plupart de mes œuvres ont été détruites par les hommes de Kabila, un dictateur. Je suis arrivé au Mans en 2018.
« Nous devons nous serrer les coudes pour faire grandir l’édifice de l’humanité »
Pourquoi avoir intitulé cette série « Humanité » ?
Je voulais présenter qui je suis, mais je suis attaché à l’humanité. L’individu qui m’a aidé avait une part d’humanité en lui. En Sarthe, Annie Galipot, une habitante de Mulsanne m’a beaucoup soutenu. Elle est venue vers moi lorsque je dormais à la gare du Mans. Elle m’a proposé de participer à un festival et nous avons tissé des liens. Il n’y a pas que du négatif dans la vie, on doit se serrer les coudes pour faire grandir l’édifice de l’humanité.
« Je puise mon inspiration dans mes racines bantous et je m’imprègne de beaucoup de cultures et de civilisations »
D’où puisez-vous votre inspiration ?
Mes racines africaines, la culture bantou, font partie de mes influences. Le peuple bantou était très accueillant et mettait le masque à l’honneur. Je cherche à perpetuer cette tradition. J’ai eu envie de retourner à la source tout en rendant également hommage à des artistes humanistes comme Paul Cezanne, Ousmane Sow ou Pierre Soulage. Ce dernier voyait beaucoup de lumière dans la couleur noire. Dans ma philosophie, je cherche à englober l’humanité en puisant dans beaucoup de civilisations et de cultures du monde.
Comment vivez-vous votre rôle d’artiste ?
En tant qu’artiste, nous ne devons pas rechercher le profit, nous devons aidé les gens et éveiller les consciences. Nous ne sommes pas des politiciens, nous sommes des témoins du monde. Comme disait l’essayiste Pierre Rabhi, nous sommes des colibris. On peut semer une graine pour amener quelque chose de bien dans ce monde pour que chacun puisse s’épanouir.
Propos recueillis par Jaheli NAMAI.
L’exposition « Humanité » de Dady Nkanga est visible jusqu’au vendredi 9 juin 2023 à la Collégiale Saint-Pierre-la-Cour, rue des Fossés-Saint-Pierre, au Mans.