Adieu ma honte : témoignage poignant contre l’homophobie

Malgré ses débuts prometteurs, Ouissem Belgacem a renoncé à son rêve de devenir footballeur professionnel à cause de l’homophobie intrinsèque à ce milieu et à sa propre homophobie intériorisée. Récit d’une lutte intérieure et d’une acceptation de soi, Adieu ma honte rayonne de sincérité et de justesse. 

« Moi, je suis le gay qu’on ne démasque jamais. Celui qui est passé inaperçu pendant des années dans un univers machiste, trop occupé à jouer un rôle qui le détruisait à petit feu » 

En grandissant dans une cité à Aix au sein d’une famille musulmane très pieuse et en évoluant dans l’univers du foot, Ouissem Belgacem s’est très tôt confronté aux insultes homophobes. En plus de cette homophobie ordinaire, il a vécu durant de longues années dans la honte de ce qu’il était : un gay musulman passionné de football. Ouissem va alors chercher à s' »hétérosexualiser » en se coulant dans les normes machistes et virilistes et en allant même jusqu’à participer à des violences homophobes. Tout ça pour ne pas éveiller les soupçons : « Je dois continuer à jouer, quoi qu’il arrive. Au foot, à l’hétéro »A force de sans cesse porter un masque, de se dédoubler, de subir l’homophobie structurelle du milieu du football, il va mettre un terme à sa carrière.

L’auteur livre un message universaliste réfutant une communautarisation de la société

Ouissem Belgacem n’est pas aveugle à l’enjeu intersectionnel d’imbrication de l’homophobie et du racisme dont il a souffert. Mais il livre un message profondément universaliste en refusant une communautarisation de la société. Alors qu’il a le sentiment qu’en allant aux Etats-Unis il évoluera dans des cercles plus ouverts et tolérants, il découvre une société fragmentée et ségréguée dans laquelle chacun se replie sur sa communauté. Adieu ma honte comporte également des pages très justes sur son sentiment d’être en décalage par rapport à l’image stéréotypée de l’homosexualité et de la culture gay. Il subit le racisme au sein même de cette communauté.

Un témoignage utile et libérateur contre l’homophobie

En plus de sa réelle qualité d’écriture (grâce au travail de la scénariste Eléonore Gurrey), Adieu ma honte se présente comme un véritable plaidoyer pour une identité complexe qui refuse tous les essentialismes et les assignations identitaires et sociales. En tant que gay musulman, Ouissem refuse de renoncer à sa foi et réussit à « trouver son islam » libéral et progressiste. En proposant un autre éclairage sur le spectre des masculinités, Ouissem Belgacem signe un témoignage nécessaire et libérateur contre l’homophobie.

Ismaël EL BOU – COTTEREAU.

Adieu ma honte de Ouissem Belgacem, (244 pages, Fayard).

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