Oscar tombe dans le ciel (épisode 8)

Découvrez la vie d’Oscar, un enfant intriguant et intrigué, dans ce récit fantastique présenté par Charlie PLÈS. Des extraits sont publiés périodiquement dans Vitav depuis le 6 mai 2020.

Ce n’était certainement pas un monstre.

Comment le savait-elle ?

Parce que les monstres, ça n’existait pas.

Comment ça, ça n’existait pas ? Bien sûr que ça existait, les monstres, il y en avait partout, il y en avait pleins dehors des monstres.

Elle y allait souvent, dehors, elle y habitait même, et elle n’avait jamais vu de monstres.

Pas de monstres ?

Pas de monstres, c’était la Vérité.

Alors pourquoi avait-on peur ?

C’était comme ça, et c’était tout.

Moitié rassuré, moitié déçu, Oscar se leva et l’emmena jusqu’à l’escalier du grenier. Il y faisait noir, et Oscar ne savait pas où trouver la lumière. Angèle tâtonna un moment et finalement trouva l’interrupteur. Elle grimpa les marches, suivie d’Oscar qui lui tenait la main. Lorsqu’ils arrivèrent en haut, ils furent pris d’une quinte de toux. De la poussière. Oscar ne se sentait pas bien dans le grenier. On y respirait mal, et l’obscurité était à peine percée par la lumière de ce matin pluvieux que filtrait une fenêtre encrassée. À tout moment, le monstre (ou quoi que ce fût d’autre) aurait pu leur bondir dessus. Angèle fouilla rapidement la pièce, déplaçant les meubles, soulevant les cartons, ouvrant la grande armoire moisie… Elle revint bientôt près d’Oscar, qui était resté devant la fenêtre. Elle haussa les épaules et lui dit de ne pas s’en faire, que ce n’était probablement qu’un rat. Oscar acquiesça distraitement. Il était entièrement concentré sur la fenêtre. Quelle merveilleuse chose que la pluie sur les fenêtres ! Une musique douce, qui vous procurait un sentiment de sécurité, de confort ; une lumière grise, un peu sombre, qui alourdissait vos paupières et tranquillisait votre âme.

Oscar s’était tourné vers Angèle, qui s’était elle aussi mise à observer le ciel lourd. Le ciel tombant sur la terre, la bataille des anges et des démons, la guerre qui, en fusionnant les deux ennemis, ressemblait à un baiser, le seul qu’Oscar eût jamais vu et sans doute le plus beau qu’il verrait jamais.

Je veux courir sur la pluie, sortirent les mots avec gravité.

Et lorsqu’Angèle lui rendit son regard, ce dernier avait perdu son désir maternel et sa pitié habituelle. Parce qu’à cet instant précis, Oscar lui avait semblé bien plus grand qu’il ne le serait jamais.

Ils étaient sortis dans le grand pré et avait couru tout leur soûl en hurlant, en chantant, en dansant, en riant, plongés entièrement dans cet à-part du monde, étrangers à ce qui n’était pas le moment présent, heureux d’être en vie, indifférents aux ténèbres de l’avenir.

Ils étaient rentrés trempés, partageant un même sourire qui leur dévorait le visage.

 

Alors, lorsque Maman, le soir même, se mit à pleurer dans la salle à manger. Oscar posa sa main sur la sienne et lui demanda de sa voix trop aiguë pour son âge d’écouter la pluie avec lui. Surprise, elle tourna la tête vers la fenêtre, et ses yeux se perdirent au loin. Ses larmes continuèrent à couler, mais ses sanglots s’arrêtèrent. Un sourire vague tira sur ses lèvres fines, et Oscar se dit que c’était déjà ça.

Charlie PLÈS.

Rendez-vous le 9 septembre 2020 pour la suite d’Oscar tombe dans le ciel !

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