Kafka sur le rivage d’Haruki Murakami (2002) est un magnifique récit fantastique qui nous confronte à la quête d’un jeune homme perdu entre ses démons et ses rêves de nulle part.
Un des nombreux points positifs de ce roman est qu’il nous fait voyager dans la culture japonaise, où le fantastique rampe dans l’ombre, imperceptible et pourtant fortement suggéré. Cette atmosphère envoûtante est renforcée par des personnages ésotériques et attachants.
Le jeune Kafka Tamura tente de fuir une malédiction qui fait de lui un Œdipe moderne, et trouve refuge dans la bibliothèque de Mademoiselle Saeki, avec qui il forme un lien étrange de désir et d’angoisse. Parallèlement, Nakata, un vieil homme retardé mental qui sait parler aux chats, avance dans une quête tout aussi énigmatique où il semble être l’instrument de forces qui le dépassent. Leurs routes tendent inévitablement à se croiser.
Le fantastique se manifeste également par des créatures qu’on ignore être réelles ou bien le simple produit de l’imagination des personnages : Nakata et son ami voient apparaître des figures de marques (comme le Colonel Sanders), Kafka est hanté par une voix aux intentions ambiguës qu’il appelle mentalement « le garçon nommé Corbeau »… On ne sait finalement quoi penser des protagonistes eux-mêmes ; si leurs intentions paraissent nobles, les spectres et les démons qui les accompagnent viennent assombrir leur nature, les rendre obscurs à la conscience du lecteur. On s’attache alors à des personnages qui nous terrifient.
Enfin, ce livre est une ode à la littérature, la bibliothèque faisant office de refuge, et de nombreuses références littéraires venant ponctuer les dialogues. Bien sûr, le nom de Kafka fait référence à l’auteur allemand dont les traces se font sentir sous la plume de Murakami.
Texte et illustration : Charlie PLÈS.