Londres, l’un des manuscrits retrouvés de Céline

En 2022 furent édités pour la première fois des romans inachevés de Louis-Ferdinand Céline, récemment retrouvés, parmi lesquels Londres, qui préfigure deux autres livres qu’il écrivit ultérieurement, Guignol’s band I et II. Cette découverte est des plus importantes car elle amplifie et éclaire une des œuvres majeures de la littérature française.

Haine et amour

Londres prend place dans les milieux proxénètes de la capitale londonienne, à la suite des évènements de Guerre, un autre des romans récemment retrouvés. Ferdinand, qui fuit toujours le front, a suivi Angèle devenue la courtisane d’un riche lord anglais, et doit désormais se faire une place pour s’en sortir. Il devient alors proxénète parmi d’autres réfugiés français, dont Cantaloup avec qui il se lie d’amitié.

La violence envers les femmes sera sûrement un obstacle pour beaucoup de lecteurs et lectrices. Il faut dire aussi que peu de catégories sociales échappent au cynisme de Céline. En revanche, l’écrivain sait dépeindre la beauté des individus même dans leurs plus grands vices. Il y a à la fois chez Céline une haine du genre humain et un amour inconditionné pour le prochain. En tout cas à la lecture des romans. N’oublions pas l’esprit collaborateur dont il a fait preuve durant l’Occupation nazie.

Des personnages splendides

On retrouve le ton de Guignol’s Band, très grotesque, foutraque, porno, violent, grandguignolesque, hilare, désespéré et parfois tendre. Et, en souterrain, l’ombre de la guerre qui, du Voyage jusqu’à Rigodon, demeurera la mal ultime, bien au-delà de toutes les tares humaines que Céline aura peint au cours de ses romans.

Certains personnages sont franchement splendides comme Borokrom et Angèle, mais aussi Cantaloup qu’on retrouve dans Guignol’s Band sous le nom de Cascade (tandis que dans Guerre, c’est un autre personnage qui porte ce nom). Cette façon qu’ont les personnages de Céline de revenir d’un roman à l’autre sans être tout à fait les mêmes interroge sur la question de la continuité de son œuvre, et du rapport entre le biographique et le fictionnel. Jusqu’à quel point Ferdinand est-il Céline ?

Enfin, Londres est une nouvelle preuve que Céline est notre plus grand styliste.

Texte et illustration : Charlie PLES.

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