Huis clos de Jean-Paul Sartre (1943) est une pièce philosophique en un acte qui, en plus d’illustrer l’existentialisme conçu par son auteur, évoque la complexité et le tragique des relations aux autres.
Trois personnages, Garcin, Inès et Estelle, se retrouvent en enfer, isolés dans une sorte de salon. Tous trois s’apprivoisent difficilement, se rencontrent sur le ton de l’animosité, de la frustration, de la haine. L’indifférence qu’ils aimeraient montrer leur est inaccessible : enfermés avec ces autres, ils n’ont d’autre choix que de supporter leurs regards.
Entre les sentiments non partagés d’Estelle pour Garcin et d’Inès pour Estelle, l’obsession d’Inès à humilier Garcin et la rage de ce dernier qui ne pense qu’à trouver un moyen de sortir, l’atmosphère de la pièce est extrêmement pesante. Une tension continue et insoluble secoue les trois personnages qui désespèrent sur leur sort : alors qu’ils attendaient un bourreau, ils découvrent, selon la formule d’Inès, que « chacun est le bourreau des deux autres », ou encore, selon celle, plus célèbre, de Garcin : « l’enfer, c’est les Autres. »
C’est bien ce regard omniprésent, ce jugement qui nous définit et nous empêche d’être passif qui constitue notre tragique condition : l’homme, pour exister, est contraint à être libre, à se projeter, à se néantiser.
A tel point que, lorsque finalement Garcin parvient à ouvrir la porte du salon, lorsqu’une échappatoire lui est enfin permise… il ne sort pas. Ni lui ni les deux autres. Il referme la porte et chacun reprend le cours de son châtiment, jusqu’au dernier mot de la pièce qui vient annoncer la fermeture du rideau alors même que le spectateur sait que, derrière, la chose poursuit son cours : « Eh bien, continuons… ».
Texte et illustration : Charlie Plès.