Le cinéaste brésilien-algérien Karim Aïnouz – à qui l’on doit notamment La Vie invisible d’Eurídice Gusmão – peine à convaincre avec la nouvelle adaptation du roman éponyme Le Jeu de la Reine, d’Élisabeth Fremantle. Le film, présenté en compétition au Festival de Cannes en mai 2023, propose une relecture féministe de l’histoire de Catherine Parr et d’Henri VIII, roi d’Angleterre.
« Catherine Parr est la sixième femme du roi Henri VIII, dont les précédentes épouses ont été soit répudiées, soit décapitées (une seule étant décédée suite à une maladie). Avec l’aide de ses dames de compagnie, elle tente de déjouer les pièges que lui tendent l’évêque, la cour et le roi… »
Le rouge transperce l’écran et vivifie les personnages
Interprété brillamment par un Jude Law méconnaissable, cramoisi, et ogresque, le roi Henri VIII est atteint d’une gangrène qui pèse sur l’entièreté du film. Seule Catherine Parr, jouée d’une grande justesse par Alicia Vikander, semble éviter la moisissure. Le personnage reste fidèle à lui-même. Si la mise en scène de Karim Aïnouz paraît parfois simpliste ou académique, elle ne manque pas de mettre en avant les rapports de force dans les regards et les chuchotements.
Un film qui semble avoir du mal à s’émanciper des codes du genre historique
Cette gangrène, comme un tic-tac incessant, résonne avec de nombreux éléments du film : les titres rouge vif, les costumes des gardes, les tapis et tissus du décor… La photographie, signée Hélène Louvart, rappelle constamment les trois couleurs primaires, comme pour signifier qu’il est aussi question d’instinct (primaire) et d’animalité. En effet, la violence sourde dans les rapports entre les personnages, et le dilemme intérieur de Catherine Parr (sauver sa vie ou rester fidèle à ses principes) font pénétrer le public dans un monde animal, sans merci, d’une puanteur particulièrement masculine.
Sacha FESTY.
« Le Jeu de la Reine » de Karim Aïnouz, en salles depuis le 27 mars 2024. Durée: 2h.