Le barrage de Petit-Saut, mort et renaissance

Petit-Saut est un barrage guyanais. Il mesure 16 kilomètres de long et a été inauguré en 1994. Il a été construit par EDF pour répondre au besoin en énergie croissant  de la population, ainsi qu’à celui de sites énergivores comme le Centre Spatial Guyanais. Aujourd’hui, le barrage de Petit-Saut fournit à la Guyane le deux-tiers de son électricité.

Lorsque le projet de Petit-Saut a émergé à la fin du XXème siècle, il a fait l’objet de critiques environnementales. EDF ne comptait pas déforester la forêt qui serait inondée par le bassin. C’est pourtant ce qui avait été fait par les Néerlandais au Suriname voisin, pour la construction du barrage d’Afobaka. Résultat : les bois inondés ont partiellement pourri, rendant une partie du carbone qu’ils contenaient dans l’eau. Celle-ci est donc fortement polluée, ainsi que les eaux du Sinnamary en aval. L’Hydréco, le « Laboratoire Environnement de Petit-Saut », surveille encore les effets méconnus de la construction du barrage.

  • Parce que la forêt n’a pas été coupée, les arbres ont pourri dans le bassin du barrage

Paradoxalement, cette inondation n’a pas eu que des effets pervers pour le biotope. Au contraire, c’est un environnement nouveau et inédit qui est ainsi né à Petit-Saut. De très nombreux arbres percent encore la surface des flots, le bois de leur souche ayant été durci par la pression en profondeur. La rareté de l’oxygène, appelée « anoxie », permet en effet à la matière de l’arbre de gagner en résistance.

Dans cette forêt à demi-immergée, certaines espèces ont donc trouvé leur compte. Les oiseaux, d’abord : on trouve plusieurs dizaines d’espèces volatiles différentes sur le site, du papegeai maillé au toucan ariel. Les mammifères, également : de nombreux pumas et jaguar profitent de cet environnement aquatique, étant d’excellents nageurs.

  • Après la destruction d’un écosystème terrestre, c’est un nouvel environnement qui a vu le jour, avec de nouvelles espèces

Enfin, Petit-Saut est devenu l’un des principaux habitats de loutres géantes d’Amérique du Sud. Cette espèce, également nommée loutre géante du Brésil ou loutre géante Sud-Américaine, vit par petits groupes familiaux allant de trois à huit individus. La loutre géante étant un prédateur situé au sommet de la chaine alimentaire, un nombre important d’individus dans une zone témoigne d’une riche faune locale.

Une fois n’est pas coutume, un projet écocide a donc entrainé la création d’un biotope vivant et prospère. Malheureusement, et comme nous le verrons dans notre prochain article, il semble que Petit-Saut n’en ait pas encore terminé avec l’exploitation humaine.

Texte et images : Mathis POUPELIN.

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