L’armée des ombres : hommage à la Résistance

Récit d’un résistant, L’Armée des ombres (1943) de Joseph Kessel rend hommage à ceux qui se sont battus non pour l’honneur ni pour la gloire ; le roman a été adapté au cinéma par Jean-Pierre Melville en 1969, ce qui offre un regard différent sur l’œuvre.

Kessel met aussi en avant la violence que subissent les résistants

Sous la forme de courts récits qui constituent tant des nouvelles que des chapitres, L’armée des ombres suit plusieurs résistants, en particulier Gerbier, dans leurs différentes opérations de sabotage et de guérillas. Le roman insiste sur la diversité des profils des résistants : d’un certain sens, la France entière a résisté, tant les communistes que les républicains, les pauvres que les riches, les paysans que les intellectuels… Kessel met aussi en avant la violence que subissent les résistants, sous la forme d’arrestations et de séances de torture, mais aussi d’annihilation jusqu’à l’oubli. En s’intéressant aux résistants les plus connus de l’Histoire, on comprend que Kessel a écrit un roman à clés qui cache les personnes sous les personnages.

Melville met en scène des hommes dans tout leur anonymat

Si Melville reprend assez fidèlement l’intrigue du livre, il adopte un ton plus mélancolique encore. Contrairement à Kessel, le cinéaste se concentre sur Gerbier et son noyau dur ; on ne voit presque aucun autre résistant, ce qui renforce l’impression d’isolement. La couleur de l’image, d’un bleu très particulier à ce réalisateur, accentue le sentiment de tristesse qui donne au film une forte pesanteur. Le visionnage en est assez éprouvant. Melville n’est pas un adepte du registre épique ; les rares scènes d’action ne sont pas accompagnées de musique ; cette dernière reste la plupart du temps silencieuse et ne vient se plaindre qu’aux heures les plus tragiques des personnages. Ceux-ci sont d’ailleurs davantage effacés que chez Kessel qui a tendance à décrire des héros. Melville met en scène des hommes dans tout leur anonymat : une armée d’ombres…

Texte et illustration : Charlie PLÈS.

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