Dans La septième fonction du langage, Laurent Binet met en scène l’intelligentsia française des années 70-80, c’est à dire tous les membres de la French Theory mais aussi les sémiologues américains ou encore Umberto Eco.
Ce polar regroupe l’ensemble de ces auteurs et penseurs que l’on peut étudier à l’université, et que l’on voit s’animer dans des scènes franchement rocambolesques. On y voit notamment Michel Foucault détourner le « Ceci n’est pas une pipe » de Magritte d’une manière qu’on ne révèlera pas ici.
Le pitch prend la forme d’une enquête policière pour déterminer qui est impliqué dans la mort de Roland Barthes. Cette recherche emmènera le lecteur à s’intéresser à un mystérieux document, la septième fonction du langage. Celle-ci est théorisée en secret par Jakobson. Elle permettrait, à quiconque la maîtrise, d’accéder à une telle puissance rhétorique qu’il pourrait mobiliser des peuples entiers par le verbe.
Le commissaire Bayard, un esprit terrien peu réceptif à la sémiologie, embarque avec lui Simon Herzog, un jeune universitaire capable de lui traduire tout ce charabia d’intello. Ils vivront ensemble des courses poursuites, des soirées de fac peuplées d’orgies, s’immisceront dans les étranges séances du Logos Club, une secte où l’on se défie lors de joutes rhétoriques…
Absurde, drôle, entraînant, satirique, intelligent…
C’est complètement délirant et pourtant très bien ficelé puisque tout finit par converger.
Bayard et Simon sont d’excellents personnages : on adore se moquer du monde intellectuel avec Bayard (ou se moquer de lui lorsqu’il est trop obtus), et suivre les angoisses métaphysiques de Simon qui se demande s’il n’est pas un personnage de roman.
Absurde oui mais aussi drôle, entraînant, satirique, intelligent…
En bref, un vrai bon roman contemporain.
Texte et illustration : Charlie PLÈS.